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Ecrits de Louis Dallière - 1937 Le baptême en vue du retour de J-C

Le Baptême en vue du Retour de Jésus-Christ [1]

 

 

[3][2] Qu'est-ce qui empêche que tu ne sois baptisé ?

 

à A C, mon frère Israélite, je dédie cet article.

L. D.

 

            I.  - LE FONDEMENT : LA BIBLE

 

Le premier Noir qui ait été baptisé au nom de Jésus-Christ, — dignitaire de la Cour d'Ethiopie dont la conversion est dépeinte au chapitre huitième des Actes des Apôtres, — semble avoir été admis très vite à ce rite sacré. A peine a-t-il posé la question : Qu'est-ce qui empêche que je ne sois baptisé ? que Philippe, le Diacre et l'Evangéliste, descend avec lui dans l'eau.

Cependant, ce néophyte avait été longuement préparé à ce moment. De race noire, il était cepen­dant Israélite de cœur, soit que sa famille même le fût devenue avant lui, soit qu'il eût été le premier à recevoir l'empreinte juive, ce que nous ignorons. Quoi qu'il en soit, il adorait l'Eternel, il connaissait sa Parole, et il y croyait. Venu à Jérusalem pour adorer au Temple, il s'en retournait, lisant sur son char le prophète Esaïe.

Là est, en fait, le fondement du baptême pratiqué par les apôtres, et que nous pratiquons aujourd'hui. C'est parce que leur foi était fondée sur la Parole de Dieu que Philippe et l’eunuque descendirent tous deux dans l’eau.

Il en est de même aujourd'hui. C'est en vertu de l'autorité biblique que nous baptisons. Certes, nous ne sommes pas sur un terrain vierge, et il y a là de [4] douloureux conflits de conscience. Depuis que, au milieu du Vème siècle, l'église de Syrie a rendu obli­gatoire le baptême des nouveau-nés, cette cérémonie est devenue pratiquement une règle absolue dans toute la chrétienté. I1 semble donc que la génération qui entre dans le Réveil soit appelée à un double baptême ?

A cette question nous répondons d'abord qu'il est inévitable qu'une effusion nouvelle de l'Esprit de Jésus vienne heurter les traditions des hommes. Le Maître redit aux hommes d'église qui sont sans cesse exposés à retomber dans des formes mortes : Pour­quoi transgressez-vous le commandement de Dieu au profit de votre tradition ?

En second lieu, il n'y a pas double baptême, mais il y a complément, accomplissement, d'un baptême bibliquement inachevé. La confession publique de la foi du néophyte, et son immersion dans l'eau, man­quent dans la cérémonie de baptême pratiquée sur l'enfant inconscient. Supposons que des Noirs por­tent à un missionnaire un païen non baptisé, qui aurait été grièvement blessé et qui serait dans le coma. Ces Noirs affirment que le mourant est con­verti, et demandent au missionnaire de le baptiser. Supposons que le Blanc, par charité, accède à cette demande, et pratique l'aspersion au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, sur le mourant. Supposons maintenant que, par miracle, ce dernier guérisse, et demande à être baptisé par l'immersion complète et consciente, comme l'Ethiopien du livre des Actes. Le Blanc pourra-t-il, en conscience, le lui refuser? Cette parabole exprime notre position vis-à-vis des personnes qui ont reçu le baptême traditionnel quand elles étaient dans la première enfance.

Enfin, nous dirons à ceux que la question du « double baptême » trouble, que notre situation est bien semblable à celle des premiers chrétiens. Eux non plus ne se trouvaient pas sur un terrain vierge, [5] car il y avait la circoncision. Le Seigneur Jésus avait été circoncis le huitième jour ; Saul de Tarse aussi. Or la circoncision était un pacte solennel dans lequel était engagé le nom du vrai Dieu, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, l'Eternel qui avait révélé son nom à Moïse. Cependant, le Seigneur Jésus, et Saul de Tarse, et tous les Juifs qui entrè­rent dans la première église, quoique circoncis, se firent immerger (c'est ce que signifie le mot bap­tiser) en vue du Royaume annoncé par l'Evangile.

 

ÜÜÜ

 

De ce qui précède il résulte que nous ne pouvons baptiser que des fidèles qui se soumettent à l'autorité de la Parole de Dieu.

La connaissance de la Bible est nécessaire au bap­tême. Le pasteur qui baptise doit s'enquérir des notions bibliques du candidat. Tous doivent avoir lu et médité les Evangiles, les Actes des Apôtres, au moins les épîtres les plus simples (Philippiens, 1 Thessaloniciens, 1 Jean), les Psaumes, les Proverbes et la Genèse. Pour ceux qui sont moyennement ins­truits, la lecture et la connaissance de tout le Nou­veau Testament doit être requise. S'il est possible, qu'on ait lu la Bible entière au moins une fois.

Quel que soit le degré d'instruction d'un candidat au baptême, une chose est fondamentale : c'est que ce candidat croie à la Parole et se soumette à son autorité. Nous ne demandons pas l'adhésion à une doctrine théologique qui expliquerait comment la Bible s’est formée, ou pourquoi elle a autorité. Nous demandons de croire, comme des enfants : que la Bible est la Parole de Dieu; que la conscience est tenue de se soumettre à toute parole de Dieu que le Saint-Esprit nous donne de saisir, de compren­dre ; que l'intelligence est tenue de s'abstenir de raisonnements, de discussions, de théories, sur les pas­sages que le Saint-Esprit n'a pas éclairés devant elle. [6] Cette foi est un don d'En-Haut. Les uns l'ont ; d'au­tres ne l'ont pas. Mais à quiconque veut de tout son être faire la volonté de Dieu, cette foi sera donnée; et celui-là connaîtra que notre enseignement sur la Bible vient de Jésus-Christ lui-même, et que nous non plus, nous ne parlons pas de notre propre chef.

 

            II. - LE CHEMIN : VENIR A JÉSUS

 

Revenons au dignitaire éthiopien du livre des Actes. Il connaissait, de longue date peut-être, les Ecritures, et il y soumettait son esprit. Toutefois il ne comprenait pas ce qu'il lisait. Philippe l'Evangéliste, rempli du Saint-Esprit, est conduit vers ce Noir isolé. Il lui annonce la bonne nouvelle de Jésus. J'imagine de longues heures de paisible conversa­tion, au rythme lent du pas des bœufs traînant le char... Puis, du cœur où l'Esprit de Jésus a tra­vaillé, jaillit la question, le frémissement d'espéran­ce ; Qu'est-ce qui empêche que je ne sois baptisé ?

Alors Philippe répond : Si tu crois de tout ton cœur, cela est possible. Croire de tout son cœur : tout est là. Mais comment pourrait-on, de tout son cœur, croire en une religion ? en des pratiques ? en des idées ? en des hommes de la terre, semblables aux autres ? De tout son cœur, on ne peut croire qu'en Jésus de Nazareth, le Fils de Dieu. Il n'y a que le Créateur qui puisse remplir le cœur de la créature, car qu'est-ce que l'homme sinon l'être à qui Dieu a donné un cœur ? La parole de saint Augustin demeurera toujours : « Tu nous as créés pour toi, Seigneur, et notre cœur est inquiet jus­qu'à ce qu'il se repose en toi. - Tu fecisti nos ad te, domine, et inquietum est cor nostrum donec requiescat in te. »

Le cœur n'a de paix, de repos, de but, qu'en Dieu. Et, en dehors de Jésus-Christ, nous ne savons où trouver Dieu. En dehors de Jésus-Christ, tout nous sépare de   Dieu : notre petitesse,  notre  ignorance,  [7] notre souillure, notre péché, notre mensonge, notre orgueil. En Jésus-Christ, le Dieu d'amour s'est abaissé à notre petitesse, car quel petit se sentirait encore méprisé par l’entant né dans l'étable de Bethléem. En Jésus-Christ, le Dieu d'amour nous a lavés, nous a rachetés, par son sang pur de toute souillure, répandu pour nous. En Jésus-Christ, notre péché est expié. En Jésus-Christ nous devenons vrais, nous pouvons lui avouer toutes nos fautes, et nos mensonges mêmes, car il nous aime. En Jésus-Christ, notre orgueil est brisé, car nous reconnais­sons que la condamnation qui est tombée sur lui, c'est la nôtre.

En Jésus-Christ, en Jésus-Christ crucifié et res­suscité des morts, en Jésus-Christ seul, le cœur de l'homme trouve Dieu : et en trouvant Dieu, il trouve tout ce qu'il désire : la source de la pureté, la source de l'amour, la source de la vie qui ne peut périr.

 

ÜÜÜ

 

Ainsi, devant l'Ethiopien, l'Ecriture-sainte était comme une porte fermée. Il y croyait, car il avait reçu déjà un don de foi d'enfant, et il voulait faire la volonté de Dieu. Mais son être se heurtait à cette Ecriture qu'il ne pouvait comprendre. Par la parole de Philippe, voilà que la porte infranchissable, dou­cement et sans effort, tourne sur son axe. L'axe de la Parole, c'est Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié. Quand le cœur trouve Dieu en Jésus-Christ, la porte tourne, le passage s'ouvre : le chemin du baptême apparaît.

La rencontre personnelle de l'âme avec Jésus-Christ est ce qu'on appelle généralement la conver­sion, ou nouvelle (seconde) naissance. Si notre intel­ligence raisonneuse s'y met, nous pouvons disserter à perte de vue, et embrouiller comme à plaisir les choses. Que sent-on quand on se convertit? Com­ment   faut-il faire pour se convertir?   Peut-on se [8] convertir sans le savoir ? Autant de questions qui piquent la curiosité. Questions stériles, nous semble-t-il.

Aux personnes que préoccupe la question de la conversion, nous disons : deux choses importent. Laissez tout le reste, et considérez seulement les deux choses que voici :

La première est que nous n'avons pas à nous préoccuper du cas des autres. Remettons à la sagesse et à la miséricorde divines le sort des enfants morts avant d'avoir atteint l'âge adulte ; le sort des âmes qui n'ont jamais entendu parler de Jésus-Christ ; le sort des croyants qui sont morts dans la religion chrétienne sans avoir rendu un témoignage public d'une conversion personnelle. Si vous êtes travaillés dans votre esprit par la question de la conversion, c'est qu'il y a un appel direct de Jésus sur vous en ce moment. La parole : Toi, suis-moi, est prononcée pour vous dans le cœur du Maître ressuscité, et elle a pour écho sur la terre la recherche qui est dans votre cœur. Laissez donc de côté toute préoccupation oiseuse; ne vous encombrez ni de psychologies, décri­vant la conversion, ni de doctrines essayant d'ex­pliquer la prédestination. La réponse à l'appel de Jésus : Suis-moi; c'est : Cet homme se leva, et le suivit. C'est là, et là seulement, qu'il faut en arriver.

La seconde chose importante pour qui pense sérieusement à la conversion, c'est de rester bien soi-même. N'essayez pas de reproduire en vous des sen­timents que vous avez entendu exprimer par d'au­tres. N'aspirez pas à reproduire automatiquement les démarches que d'autres ont faites. Soyez simple. Soyez droit de cœur. Soyez vous-même. Puisque la conversion, c'est la rencontre avec Jésus-Christ, cherchez non une expérience, une doctrine ou des pratiques, mais cherchez Jésus-Christ. Lisez, relisez, méditez sans cesse les quatre évangiles. Recherchez la compagnie de ceux en qui [9] vous reconnaissez la présence de Jésus-Christ, et écoutez-les dans la mesure ou leur parole, comme celle de Philippe, vous rapproche de Jésus-Christ. Priez Dieu dans le secret avec la lumière que vous avez. Demandez-lui de vous montrer sans doute possible que Jésus est son Fils unique, le Sauveur et le Sei­gneur de tous. Enfin mettez en pratique les lumières que vous avez; obéissez à votre conscience et à la voix du Saint-Esprit, dans la mesure, si faible soit-elle, où vous pouvez l'entendre.

Celui qui agit ainsi, trouvera Dieu en Jésus-Christ. Comment ? je n'en sais rien. Illumination soudaine, délivrance apportée par un homme, une réunion, une lecture solitaire ? Peu importe. Ce sera ce que Dieu voudra. Ce sera ce qu'il fallait. A Dieu il appar­tient de donner la conversion où il veut, quand il veut, comme il veut. A nous il appartient de cher­cher, — non la conversion, non une expérience reli­gieuse, — mais de chercher Dieu, en Jésus-Christ, de toute la force de notre être.

L'Ethiopien avait cherché, droitement, sans se relâcher. La grâce lui fut donnée quand Dieu jugea bon d'envoyer vers lui son serviteur, tout conduit par l'Esprit.

 

ÜÜÜ

 

A vrai dire, les mots « se convertir » et « conversion », s'ils sont authentiquement bibliques, sont cependant peu usités dans le Nouveau Testament. Le substantif n'est employé, sauf erreur, qu'une seule fois. Paul et Barnabas, se rendant à Jérusalem, au chapitre quinze des Actes, racontent la conversion des païens. Ce texte, au surplus, ne désigne pas tel­lement, comme notre mot « conversion », une expérience purement intérieure ; il désigne ici l'ensemble du travail des apôtres : leur prédication, l'acceptation dans le cœur des païens, leur baptême, leur marche dans une voie toute nouvelle.

[10] La réalité que nous désignons sous le nom de conversion est cependant capitale. N'avons-nous pas vu que c'était la porte tournant sur son pivot, l’entrée dans le chemin ouvert qui passe par le baptême et qui va vers la vie éternelle ? Admirons et imitons, la sagesse des Ecritures. N'employons pas trop le mot abstrait de conversion, mais serrons de près la réa­lité qu'il veut désigner. Il y va de tout.

La réalité qui ouvre le chemin, c'est donc la rencontre personnelle avec Jésus-Christ ; ou encore : l'acceptation personnelle du nom de Jésus. Cette réa­lité, c'est de saisir que Jésus est une personne vivante, et de se donner à lui. Se mettre en contact avec Jésus. Venir à lui. Nouer un pacte avec lui. Contempler la croix, et répondre à ce que Jésus a fait pour nous. Accepter personnellement son sacri­fice pour nos péchés personnels. Prendre Jésus pour Maître. Donner son cœur au Seigneur Jésus. Voilà autant d'expressions touchantes par lesquelles les âmes s'efforcent d'exprimer la réalité ineffable qui leur a été donnée par la grâce de Dieu. Le dialogue de Philippe et de son prosélyte résume toutes ces expressions avec l'admirable concision de la Parole de Dieu : Qu'est-ce qui empêche que je ne sois baptisé? Si tu crois de tout ton cœur, cela est possible ! L'eunuque répondit : Je croîs que Jésus-Christ est le Fils de Dieu.

 

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Les pasteurs de Réveil ne doivent baptiser que des personnes qui ont passé par la conversion, au sens que nous venons de dire.

Ce second principe est capital. En effet, le baptê­me, pas plus qu'aucune autre pratique, n'est néces­saire au salut éternel d'une âme. Le salut est dans la croix de Jésus-Christ, et uniquement là. L'appli­cation du salut à une âme individuelle est l'œuvre de Dieu, non l'œuvre de cette âme. Il y faut, dans [11] cette âme, l'acceptation qu'on nomme la foi. Mais, en dernier ressort, la foi est un don de Dieu.

Il est donc indispensable que personne ne rem­place la foi en Jésus-Christ, qui est le Sauveur, par la foi en un baptême, lequel n'a de sens que comme un acte d'obéissance au Sauveur à qui l'on a déjà donné son cœur et sa vie. Certes le baptême est un acte public et total de conversion. On peut dire qu'il par­fait la conversion, qu'il la parachève. Mais il n'en est pas la partie primordiale ; et il ne peut jamais remplacer la partie primordiale, qui est l'acte de Dieu appliquant à une âme la vie qui est donnée par les mérites de son Fils.

Proposons une parabole encore. Un cheval qui n'a jamais été harnaché est pourtant un cheval vivant. Il a la vie, parce que Dieu la lui a donnée, et ce n'est pas le harnais qui lui donnera la vie, ni la force de porter l'homme. Mais, sans le harnais, l'homme ne pourra le monter ni le conduire où il veut. La vie, c'est Christ en nous. Le baptême, c'est le harnais, en vue d'un service.

Ce point doit être très fermement acquis. Toute pratique chrétienne, tout acte d'obéissance, sont à cet égard, dans le même cas que le baptême du Réveil. On risque toujours de se glorifier d'un acte d'obéissance, au lieu de se glorifier en Jésus-Christ, qui a inspiré l'obéissance, et en a donné la force. Que Dieu nous en garde! Et, entre serviteurs de Dieu, plutôt que de nous jeter la pierre sur les dan­gers d'orgueil religieux que présente tel acte recom­mandé par le voisin, cherchons plutôt, les uns et les autres, à amener les âmes à Jésus-Christ. S'il y a des chevaux vivants, que chacun soit libre de recom­mander le harnais qui, en toute conscience, lui paraît voulu de Dieu et conforme à sa Parole. Mais si la cavalerie est morte, on ne la ressuscitera pas [12] en discutant sur la forme de harnais à recom­mander.

 

ÜÜÜ

 

Comment les pasteurs reconnaîtront-ils que les candidats au baptême remplissent la seconde con­dition énoncée, et qui n'est qu'une forme plus pré­cise de la première : car on ne peut se soumettre vraiment à l'autorité de la Parole de Dieu que si l'on donne son cœur à Jésus-Christ ?

Certes, il y a les affirmations des candidats! : « Je crois, je demande le baptême. » Il appartient aux serviteurs à qui le baptême est demandé de prier pour que Dieu les guide dans chaque cas particulier. Pour l'Ethiopien, Philippe ne s'est pas trompé : il a été guidé par l'Esprit de bout en bout. Pour Simon le Magicien, il l'avait baptisé à tort : Simon n'était pas converti.

Quand un ouvrier de Jésus baptise une âme, cet ouvrier prend sa responsabilité d'ouvrier. S'il a prê­ché tout le conseil de Dieu; s'il a instruit sans se lasser dans la vérité; s'il a eu le courage de ne pac­tiser avec aucun péché connu en lui ou en les autres; s'il a mené une vie de prières, avec larmes, portant devant Dieu la mort des âmes et intercé­dant pour elles; s'il a accepté de tout cœur les souf­frances, les peines, les lenteurs, les renoncements; de son service : alors Dieu enverra vers lui pour le bap­tême des âmes réellement converties, et il lui don­nera de les reconnaître.

Le degré de sincérité spirituelle des hommes et des femmes qu'un homme baptise est, dans la sagesse de Dieu, le reflet du degré de vie qui habite réellement en cet homme. La vie des baptisés évalue la valeur de celui qui a donné le baptême. Le baptême d'une âme réellement convertie est la récompense divine du labeur d'un prédicateur de l'Evangile. Le baptême [13] prématuré d'une âme qui n'était pas vivante en Christ, est un jugement qui retombe sur le prédica­teur.

Ainsi, pour savoir si une âme est réellement con­vertie, il peut y avoir des méthodes à suivre. L'homme de Réveil doit être prudent, et il ne doit jamais aller trop vite, s'il veut faire du bon travail. Il y a des méthodes, il y a une prudence, il y a des précautions. Mais, en dernière analyse, tout repose sur l'état du cœur du messager de Jésus-Christ. Vit-il dans la communion de son Dieu, dans sa paix et son repos, alors il reconnaîtra une à une les âmes qui ont été enfantées par la Parole de Dieu à la même vie d'en-haut.

Nous nous permettrons de citer ici encore le mot d'un homme de la terre. Celui-ci n'était pas chré­tien, mais juif, comme les prophètes d'avant le Christ. « Verum index sui », a dit Spinoza, le philosophe : c'est-à-dire la vérité porte en elle-même sa propre marque; la vérité est l'indice d'elle-même. Cette parole latine presque intraduisible est aussi une parole qui demeure.

Pour nous, Jésus-Christ est la vérité. Jésus sur la Croix, vérité qui porte en soi-même la preuve, l'évi­dence, de la vérité absolue. Une âme qui est née de nouveau, par Jésus-Christ, porte en elle-même l'évi­dence de sa conversion. C'est cette âme là qu'un serviteur de Jésus-Christ, s'il est lui aussi dans la vérité du Maître, saura saluer à son approche. C'est elle qu'il baptisera, au temps fixé, par le Père, de toute éternité.

 

 

 

[14] Baptisés en un seul esprit pour former un seul corps

 

 

Ecrivant aux chrétiens de Corinthe, saint Paul rend grâces à Dieu de ce qu'il n'a baptisé aucun d'eux, à part de rares exceptions. Ainsi personne ne pourra dire qu’il a été baptisé au nom de Paul. Du reste Paul lui-même n'a pas été envoyé pour baptiser mais pour annoncer l'Evangile, et dans des condi­tions telles que la Croix de Christ ne fût pas rendue vaine.

On ne peut pas conclure de ce passage que Paul attachait peu d'importance au baptême. Au contraire, tout ceux à qui il s'adresse ont effectivement été bap­tisés ; seulement la cérémonie a été pratiquée par un autre que l'apôtre. Après les réunions faites par Paul et ses collaborateurs, au milieu de l'enthousias­me, de la joie et des luttes, il eût été facile de consti­tuer un parti de Paul. Le prédicateur aurait eu ses adeptes fervents, groupés pour conserver sa doctrine, son esprit. Mal compris, le baptême eût favorisé la for­mation de ce parti de Paul, il eût été le signe du rat­tachement à un homme. Bien compris, le même baptême devient l'arme qui brise toute velléité de sectarisme. C'est au nom de Jésus-Christ que les Co­rinthiens ont été baptisés : et, un peu plus loin, Paul pourra leur dire : Nous avons été baptisés en un seul Esprit pour former un seul corps.

 

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Le baptême que pratiquent les apôtres est une identification du croyant avec Christ ; du même coup il est une incorporation du croyant au corps de Christ.

[15] Dès qu'une âme est unie au Seigneur Jésus, elle n'est plus seule. Pour l'éternité sa solitude est finie. Toujours l'homme qui s'est donné au Sauveur pourra dire : « Je suis deux ». Christ est avec lui sans cesse. Mais non seulement cela : si ce n'est plus moi qui vis, mais Christ Qui vit en moi, en Christ je retrouve d'autres êtres qui ont passé par le même chemin que moi. Je ne puis pas me vanter d'être seul uni à Jésus-Christ ; je ne peux pas exclure du cœur de Jésus-Christ aucun de ceux qu'il a appelés lui-même.

Ainsi le baptême forme le corps de Jésus-Christ. Le Juif se croit-il seul héritier des promesses qui ont été confirmées par le ministère du Messie ? Le minis­tère de Paul viendra lui rappeler que s'il plaît à Jésus d'appeler des païens à la grâce, le Juif trouvera ces païens en Jésus, baptisés en un seul Esprit pour for­mer un seul corps. Le riche propriétaire veut-il ex­clure du salut les esclaves qu'il a considérés jusque là comme une sorte de bétail ? Sous le sang de la Croix, eux aussi sont, baptisés avec lui en un seul Esprit pour former un seul corps.

Ainsi quand on étudie les épîtres de saint Paul, on voit qu'il est impossible de séparer la justification par la foi de la constitution du corps de Christ. Les deux choses vont ensemble. Le baptême, vu sous cet angle, est l'acte tout petit et tout humble qui fait passer l'homme d'une vie de solitude dans le péché, à une vie d'amour dans le corps de Christ.

C'est dire que le baptême ne peut pas être séparé de toutes les richesses de grâce qui attendent le croyant sur le chemin nouveau où il vient de s'enga­ger. Le baptême n'est qu'une sorte de point mathé­matique, autour duquel s'étendent des cercles de plus en plus larges ; ces cercles représentent tous les tré­sors qui sont ouverts à la foi du nouveau converti. C'est le pays de la conquête dans lequel il va s'avan­cer maintenant. Aussi faut-il dire que le baptême biblique est absolument inséparable des grâces de la [16] vie chrétienne, il est lié au baptême du Saint-Esprit ; mais non seulement cela, il est lié aussi à la Sainte Cène, et il est lié profondément au retour de Jésus-Christ.

Pratiquer le baptême tout en le séparant du reste serait courir le risque de former à nouveau « un parti de Paul », c'est-à-dire un parti humain groupé au­tour d'une personnalité de la terre. Or, le baptême n'a de sens que s'il fait évanouir toute prééminence de l'homme afin de rendre possible la constitution du corps de Jésus-Christ uni à son seul Chef. Le point mathématique que nous prenions tout à l'heure comme comparaison peut représenter l'identification complète du croyant avec Christ seul. Uni à Christ, il peut être rempli de l'Esprit de Christ, il peut tra­vailler à l'édification du corps de Christ, il peut pré­parer le retour de Christ.

Rien n'est plus facile que de célébrer un baptême vide de signification spirituelle ; c'est si pratique de se reposer sur une cérémonie. Le cœur humain, tou­jours avide de se justifier devant Dieu, ne demande qu'à pratiquer quelque rite qui le mettrait en règle avec les exigences divines. On ne saurait trop répé­ter que l'homme ne peut jamais se mettre en règle avec Dieu ; c'est la Croix de Christ qui a expié le péché et qui a mis l'humanité en règle avec Dieu ; hors de la Croix il n'y a pas de religion, il n'y a pas de communion avec le Dieu vivant et vrai, celui qui parle dans la Bible. Qu'on se garde de pratiquer le baptême de telle manière que la Croix puisse être rendue vaine.

Suffira-t-il pour éviter cet écueil de lier le baptême d'eau à la recherche du baptême du Saint-Esprit ? Certes, cela est très important ; dès que l'homme demande à Dieu le don de son Esprit, il y a une action qui s'opère par la fidélité de celui qui a fait la pro­messe. L'Esprit qui a été demandé vient besogner dans le cœur, l'Esprit vient travailler à la formation de ce corps de Christ où chaque croyant doit être [17] incorporé. Mais là encore il peut y avoir un écueil : on risque encore de vouloir se mettre en règle avec Dieu en passant par certaines initiations. Le cœur peut essayer de se justifier devant Dieu en s'appuyant sur le fait d'une expérience, d'inspirations, de parler en langues, de guérisons ; or, la Parole nous dit expressément que l’on peut prophétiser et chas­ser des démons et cependant n'être pas reconnu par Christ parmi les siens au dernier jour. L'essentiel est, donc que le baptême soit intimement lié à une con­naissance effective de la Parole de Dieu relativement au Corps de Christ. Remis par le baptême entre les mains de Christ, le nouveau croyant est en droit de s'attendre à recevoir la plénitude de l'Esprit qui a été promis par Christ ; et s'il est baptisé dans le Saint-Esprit c'est en vue de former avec tous ses frères et avec toutes ses sœurs le corps unique de Jésus-Christ.

 

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Celui qui demande le baptême, s'il comprend ce qu'il fait, doit être prêt à une consécration totale de tout son être à Jésus-Christ, son unique Seigneur. Croire de tout son cœur à Jésus-Christ, c'est se donner à Lui de tout son être.

La foi s'incarne en une attitude d'obéissance.

Si mon imagination se figure qu'elle croit en quelque doctrine chrétienne, ma vie continuera son cours sans aucun changement ; si mon cœur est réellement saisi par une foi qui est un don de Dieu, alors ma vie changera du tout au tout, car je me mettrai à agir en conséquence de la foi qui m'a été donnée.

Est-il possible de se consacrer entièrement à Jésus-Christ seul ? Il faut bien le dire, à cette ques­tion l'expérience semble répondre que non. La con­séquence de la foi est en général l'incorporation non au corps de Jésus-Christ mais à une église particu- [18] lière ; cette église propose à ses fidèles un certain nombre de traditions qui représentent plus ou moins bien la volonté de Jésus-Christ. Ainsi ce que Paul aurait voulu éviter est devenu la pratique courante : les uns sont de Paul, les autres d'Apollos, les autres de Céphas. Entre ces divers partis : catholiques, protes­tants, dissidents, il n'y a pas de communication, si ce n'est, hélas, des communications de polémique, de lutte, bref, des excommunications.

Aussi nous reconnaissons volontiers que le baptême que nous pratiquons dans le Réveil est profondément révolutionnaire. Au lieu d'inviter les croyants de Ré­veil à sortir de leur parti actuel pour entrer dans un nouveau, nous les invitons à rester là, où ils étaient quand ils ont été appelés, mais nous leur de­mandons de changer leur attitude intérieure et de saisir une consécration totale de leur être à Jésus-Christ. Par cette consécration, sans former une or­ganisation nouvelle, les croyants baptisés doivent pénétrer dans la réalité et dans l'unité du corps même de Jésus-Christ.

 

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Se consacrer de tout son être à Jésus-Christ, c'est croire d'une façon effective à la divinité du Fils. La Croix révèle l'Amour de Dieu : celui qui a été cru­cifié est le même que le Tout Puissant, le Créateur ; le Père et le Fils sont un. La réalité pratique de la divinité de Jésus Christ c'est l'acceptation de toute chose dans notre vie comme étant l'expression de la volonté du Dieu d'amour. Par le baptême un pacte de réconciliation est conclu entre Dieu et l'homme. L'homme accepte de croire de tout son cœur, il se livre entre les mains de Dieu. A partir de cette minute tout dans sa vie ne sera que marque d'amour du Tout Puissant. Il y a dans le baptême une soumis­sion totale de l'esprit humain aux voies insondables du Père céleste ; il y a à l'avance une acceptation de toute souffrance, de quelque quartier qu'elle puisse [19] surgir, quelque forme qu'elle puisse revêtir. Je livre ma vie totalement à Dieu dans l'invocation du nom de Jésus ; comment pourrai-je croire qu'après cet acte de consécration une seconde de mon existence puisse échapper à la garde miséricordieuse de celui en qui je me suis remis ? Si Satan peut avoir dans ma vie après le baptême une action quelconque non contrôlée par Dieu, c'est que Dieu n'est pas tout puissant ou qu'il n'est pas fidèle. L'invocation du nom de Jésus m'a introduit dans le cœur même de Dieu. Comme le Fils a été soumis au Père en toutes choses, même les choses incompréhensibles et dou­loureuses par lesquelles il a appris l'obéissance, ainsi le baptême introduit dans une soumission de fils, dans l'esprit doux et paisible d'un enfant qui est conduit et gardé sans cesse par son père.

Se consacrer totalement à Jésus-Christ c'est croire aussi que Dieu test capable de nous faire connaître sa volonté au temps convenable. Si Dieu n'intervient pas dans la vie de ses rachetés pour commander, pour éclairer, pour corriger, pour reprendre, alors comment y aurait-il de leur part obéissance ? Dieu s'occupe de ceux qui ont été baptisés en Jésus-Christ comme il s'est occupé de son Fils unique, à chaque instant ; et comme le Fils faisait en toute chose la volonté du Père, ainsi les fils qui sont devenus fils en s'incorporant au Fils unique, pourront connaître jour après jour la volonté du Père. Dieu a des moyens extrêmement simples de nous parler ; quelquefois il use d'inspiration intérieure, mais bien souvent aussi il nous parle d'une manière tellement claire par les hommes et par les circonstances. Les brebis qui sont de vraies brebis reconnaissent la voix de leur berger; elles la reconnaissent quand cette voix leur est ap­portée, soit par quelque événement, soit par quelque parole de la terre, car rien n'arrive sans signification, rien n'arrive sans une volonté expresse de celui à qui nous nous sommes remis totalement une fois pour toutes. La consécration complète du baptême [20] suppose que nous nous fierons moins à notre sens propre, moins à nos raisonnements, moins à nos ap­préciations personnelles, mais beaucoup plus à tout ce qui peut nous être donné par le canal de ceux qui nous entourent et par le canal des événements. Nous ne chercherons pas la volonté de Dieu en nous en­fonçant dans les voies obscures de l'analyse de nos sentiments ; nous la recevrons au contraire en ou­vrant tout simplement les yeux sur un monde tout éclairé du beau soleil de la grâce.

Se consacrer totalement à Jésus Christ c'est s'at­tendre à ce que Dieu nous fasse connaître sa volonté par des paroles qui ont passé sur les lèvres même de Jésus, ou à travers l'inspiration infaillible des pro­phètes et des apôtres. La Bible est un trésor inépui­sable dans lequel le Saint-Esprit puisera sans cesse. Au temps convenable la parole convenable nous sera donnée. Certes il n'est pas question de pêcher des versets à tort et à travers pour se prétendre inspiré et guidé ; il n'est pas question de se faire un petit code de pratiques plus ou moins baroques appuyées sur des passages de la Bible plus ou moins bien inter­prétés. Nous l'avons dit : le croyant qui comprend le sens de son baptême se fiera peu à, son sens propre, il se méfiera des constructions de son esprit, même si ces constructions s'appuient sur des versets bibli­ques, mais celui qui suit une voie d'obéissance toute simple, comme celle d'un enfant, recevra au temps convenable la parole pleinement éclairée dont il a besoin. Cette parole lui sera fournie souvent par les autres, il l'entendra sur des lèvres humaines, et elle se gravera profondément dans son cœur ; ne se fiant pas à son sens propre il attendra de recevoir les pa­roles dont il a besoin, plutôt que d'aller les chercher par une quête où il risquerait de mettre quelque chose de lui-même. Une parole biblique qui est don­née à l’âme par l'Esprit de Dieu est donnée en pleine lumière, dans son sens profond et spirituel, elle est mise en rapport par le Saint-Esprit avec la clé de [21] toute la Bible, la Croix. Lorsqu'une parole est reliée à la Croix, lorsqu'elle devient une parole qui nous crucifie avec Christ, lorsqu'elle nous fait passer par un chemin de repentance, d'humiliation, d'abaisse­ment, alors nous pouvons dire qu'elle nous est réelle­ment donnée par le Seigneur.

Se consacrer totalement à Jésus Christ c'est donc admettre que lorsqu'une parole nous sera donnée par Dieu, nous pourrons la saisir dans sa plénitude. Avant le Réveil nous avions l'habitude de saisir les paroles inspirées d'une manière partielle, nous les adaptions. On entend couramment répéter qu'il est impossible de réaliser l'Evangile dans sa totalité : les circonstances ont changé, les temps, les lieux ; il faut adapter. Il n'en va pas de même dans le bap­tême ; lorsqu'une parole est donnée, c'est que le moment est venu de la prendre telle quelle, dans toute sa richesse. Une parole de Dieu est comme un fruit qui mûrit en sa saison. Quand notre Père met le fruit dans la main de son enfant, c'est que le moment est venu de savourer ce fruit, de s'en nourrir; fruit qui peut paraître amer à notre goût, mais qui contient pour notre nourriture toutes les énergies divines. Transformer la Bible en une loi, vouloir bâtir sur la Bible une sorte de gouvernement où toutes les actions des hommes seraient réglées à l'avance : tentative impossible, tentative condamnée par la Bible elle-même, puisque la volonté de Dieu qui est exprimée dans la Loi ne peut pas être accomplie par la puissance de la Loi, mais seulement par la puissance de la Croix. Dans la consécration totale les actes d'obéissance sont mesurés par le Père ; ils varient pour chaque être selon sa destinée propre, selon le temps, selon le moment. Mais lorsqu'un acte d'obéissance est posé devant une créature baptisée, cet acte est absolu, il ne comporte ni adaptation ni compromis. Ainsi après le baptême, Dieu pourra, demander à un moment précis fixé par lui seul, que telle âme quitte effectivement toute sa fa- [22] mille; i1 pourra demander au moment où il voudra que telle âme vende réellement toutes ses propriétés et ses biens.

Bref, se consacrer totalement à Jésus-Christ c'est admettre à l'avance que les paroles de Jésus Christ devront avoir leur effet plein et entier dans notre vie, au fur et à mesure que Dieu nous les donnera comme une nourriture réelle pour notre être spirituel.

 

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S'il y a seulement deux êtres sur la terre qui sai­sissent la consécration totale dans le baptême, Dieu ne peut pas séparer ces deux êtres mais il les unira. Autant d'êtres il y aura qui accepteront cette con­sécration totale, autant d'êtres Dieu unira pour former le corps de Christ. II est absolument impos­sible que celui qui est mort sur la Croix pour récon­cilier les hommes avec Dieu, et les uns avec les autres, sépare ses fidèles les uns des autres une fois qu'ils se sont donnés totalement à lui. Tout esprit de division vient de l'ennemi, tout esprit d'union vient de la Croix. Par la consécration totale le croyant baptisé devient réellement un membre du corps de Christ ; du même coup il devient réellement lui-même, il trouve son être propre. Exister comme un être vivant conscient de sa personnalité, ce n'est pas exister en se séparant, en s'opposant aux autres, c'est exis­ter en s'unissant ; le pied n'est vraiment pied que parce qu'il tient au corps et la main n'est vraiment main que parce qu'elle est articulée au bras. Croire que l'on est plus soi-même parce qu'on n’a pas de lien avec les autres c'est saisir son indépendance dans un sens de mort ; le baptême va complètement à l’encontre de cela. Une fois baptisés, notre desti­née est d'être pleinement consacrés, pleinement nous-mêmes, pleinement obéissants au seul Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. Mais parler de cette con­sécration totale encore une fois, c'est réaliser notre [23] être de membre, qui ne peut pas vivre sans les liens qui le rattachent aux autres, également consacrés, également sauvés. Le baptême est la conquête d'une vraie liberté, la délivrance de toutes les puissances tyranniques qui ont leur source dans le péché; il nous rend indépendants des hommes et des choses pour être dépendants de Christ seul : Tout est à vous, vous êtes à Christ.

En même temps, sans aucune contradiction, le baptême est la perte de toute fausse indépendance, il est le lien qui nous donne notre être de membre, il nous fait mesurer notre petitesse, il nous rend indispensable la communion avec tous ceux qui ont passé par le même chemin que nous. Etre baptisé c'est ne plus exister pour soi, c'est exister pour Christ et comme membre du corps de Christ.

 

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Un caractère très frappant de l'œuvre du Saint-Esprit à l’heure actuelle est donc que le lendemain devient vraiment imprévisible ; il y a aussi cela dans le baptême. Dans les affaires il arrive qu'on donne une procuration en blanc, c'est dire que l'on fait confiance à quelqu'un au point d'apposer sa signa­ture sur un papier blanc où l'autre pourra nous faire dire ce qu'il voudra. Le baptême est une procuration en blanc donnée à Jésus-Christ pour toute notre destinée terrestre et éternelle ; nous signons à l'avance que nous nous engageons à suivre le che­min qu'il tracera lui-même sur la feuille blanche de notre vie à venir. Nous lui donnons cette procura­tion parce que nous avons confiance en lui; nous croyons que le chemin qu'il tracera sur la feuille signée par nous est la vérité et la vie.

Nous n'avons pas été baptisés en Jésus-Christ et dans son Esprit pour former un parti, une religion, une institution, une organisation, un établissement terrestre quelconque. Nous avons été baptisés pour [24] aller nous ne savons où ; nous avons été baptisés pour suivre un maître à qui nous avons tout remis ; nous avons été baptisés pour former en lui un seul corps avec les autres baptisés.

La marche de chaque membre dépend de la mar­che du corps ; le pied ne peut pas aller se promener à droite si le corps est dirigé à gauche. Le plan du Réveil n'est révélé à l'avance à aucun homme, il est dans le cœur de Jésus-Christ, et cela nous suffit. Il n'en est pas comme de la Loi de Moïse qui avait été donnée pour être gravée sur des tables de pierre ; maintenant c'est dans des tables de chair, dans des cœurs, que Dieu inscrit sa volonté par le Saint-Esprit, mais il l'inscrit au fur et à mesure que les serviteurs de Jésus-Christ sont prêts à accomplir cette volonté : Dieu donne en même temps dans les cœurs le vouloir et le faire. Ainsi nul homme ne peut tracer le plan du Réveil; chacun à la place où il est mis dans le corps, doit obéir jour après jour. Obéir au Maître, nous soumettre les uns aux autres selon que Christ par sa Parole nous demande cette obéissance mutuelle : voilà tout notre lot. Où nous allons, nous n'en savons rien.

Vous n'avez pas encore passé par ce chemin, disait Josué au peuple rassemblé sur la rive du Jourdain. La chrétienté non plus n'a point encore passé par le chemin où elle est conduite maintenant, car le Réveil où nous entrons est le dernier qui sera donné à la terre. Le chemin est nouveau parce qu'il doit aboutir à une chose réellement nouvelle : la venue du Fils de l'homme, la Résurrection des morts, la transformation des vivants.

En vue du retour du Fils, toutes les églises qui se sont formées dans le passé comme des institutions consécutives à des Réveils, apparaissent comme autant de branches de la vigne de Jésus-Christ ; en chacune d'elles il y a un dépôt de vie divine, même sous les apparences de la mort, il en est de ces bran- [25] ches comme d'une greffe que l'on détache d'un arbre pour la transplanter sur un autre. En bonne logique ce fragment greffé devrait mourir par le fait qu'il est coupé ; mais il transporte en lui sa vie, et il reprendra vie par la sève qu'il recevra de son nouveau tronc. Il en est tout à fait de même des églises : en apparence elles sont séparées, en appa­rence la mort agit en elles, mais elles ne vont pas à une mort totale qui rendrait parfaitement vaine la Croix de Christ. Il fallait un dernier Réveil dont le but ne fût plus de constituer une branche nouvelle, mais de réunir sur un seul tronc qui est la Croix, toutes les branches en apparence séparées, mais unies déjà virtuellement dans la sagesse insondable du Père. Au fur et à mesure que le baptême avec son sens de consécration totale à Jésus-Christ seul, prendra pied par une œuvre d'Esprit et d'amour dans les différentes branches de l'église chrétienne, la forme du corps de Christ se précisera. Aussi le Réveil n'entreprend-il aucune réforme des formes extérieures ; il laisse à l'Esprit le soin de faire son œuvre de vie, et ce qui est mort, bois mort, feuille morte, le Père lui-même le retranchera en son temps : le vent de l'Esprit qui souffle où il veut l'empor­tera sans l'intervention d'aucune main.

Pour les croyants baptisés dans l'esprit que nous avons essayé de préciser, le chemin imprévisible est un chemin d'amour : amour pour l’église, l'œuvre d'évangélisation, le groupe humain, au sein duquel ils étaient quand ils ont été appelés amour pour le peuple qui les entoure. Chemin difficile ; chemin nouveau : Vous n'avez point encore passé par ce chemin.

Si le chemin est imprévisible, nous savons du moins une chose : c'est que c'est un chemin sur lequel il y aura une unité sans cesse plus grande du corps de Christ. Tout ce qui aboutit non à la réunion, mais à la séparation  est un reniement du baptême. Le [26] but du baptême est union : Baptisés en un seul Esprit pour former un seul corps.

Et puis, si le chemin est imprévisible, son but ultime est aussi union avec celui en qui nous croyons sans l'avoir vu encore. Le Réveil actuel doit aboutir au retour de Jésus-Christ. Nous ne pouvons pas fixer à l'avance la durée de ce Réveil, mais nous savons, d'une certitude intérieure et inébranlable, qu'entre ce Réveil et le retour de Jésus-Christ, il n'y a plus de place, ni pour une nouvelle période de sommeil, ni pour un nouveau Réveil. Ce Réveil ne peut pas se durcir : car il se refuse absolument à former un établissement terrestre qui, un jour ou l'autre fini­rait par faire obstacle à l'œuvre de l'Esprit. Il veut rester pauvre, dépouillé. Son privilège est de ne posséder que Jésus-Christ seul.

[Ainsi chaque branche de la chrétienté a ses rites d'initiation; baptême des nouveau-nés et confirma­tion ; prise d'habit, prise de voile ; banc des péni­tents, cartes de décisions, enrôlements divers. Le bap­tême d'adulte par immersion peut jouer ce même rôle d'introduction dans une église particulière, égli­se baptiste, assemblée de Dieu, assemblée de Frères.

Pour nous, le baptême du Réveil a un tout autre sens il est don de soi à Jésus-Christ, et à Jésus-Christ seul. Il affirme Jésus crucifié, Jésus ressuscité, Jésus qui revient. Ce baptême ne crée pas une église parti­culière nouvelle. Il ne met pas sur les âmes une em­preinte humaine. Il n'est pas le sceau d'une société terrestre.

Le baptême du Réveil affirme en un acte d'obéis­sance que le corps de Christ est un ; il affirme que l'Eglise de Christ c'est son Epouse, qui n'appartient qu'à lui seul. Il élève nos regards vers le jour de l'ap­parition de Jésus dans sa gloire, jour où le corps de Christ apparaîtra aussi pleinement formé, et sera remis entre les mains de son seul chef.

Le baptême du Réveil est attente active du retour de Jésus].[3]

 

 

 

[27] S'asseoir d'abord et calculer la dépense

 

 

Car, lequel de vous, s'il veut bâtir une tour, ne s'as­sied d'abord pour calculer la dépense et voir s'il a de quoi la terminer, de peur qu'après avoir posé les fon­dements, il ne puisse l'achever, et que tous ceux qui le verront ne se mettent à. le railler; en disant : Cet homme a commencé à bâtir, et il n'a pu achever ? Luc 14/28-30.

L'homme que dépeint cette parabole, l'homme qui s'assied et calcule la dépense avant de bâtir la tour, c'est d'abord le Seigneur Jésus lui-même.

La tour que le Sauveur avait à bâtir, c'est son Eglise. Celle-ci est l'Epouse que Dieu, le roi du ciel, destinait à son Fils. L'achèvement de la tour, c'est le jour où, cette Epouse étant pleinement formée, Dieu pourra entrer en possession de la création sur laquelle le mal avait, pour un temps, étendu son ombre. Le retour de Jésus, avènement du Messie glo­rieux, est la rencontre de l'Epoux avec son Epouse. L'homme et la femme avaient été créés pour régner sur la création et la ramener à Dieu. La pensée du Créateur se réalisera, dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre où la justice habitera, en la personne du second Adam, Christ, uni à son Epouse, l'Eglise qu'il a lui-même formée.

Jésus-Christ a posé les fondements de la tour quand il est venu sur la terre. Il a appelé auprès de lui les Amis de l'Epoux, les apôtres, réunis dans le nom de Pierre: sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise. Mais, en posant les fondements, Christ a porté son regard jusqu'au faîte de la tour, qu'il contemplait [28] dans la sagesse éternelle du Père. Il n'a pas commen­cé à bâtir de telle sorte qu'il ne pût ensuite achever. Son œuvre terrestre embrasse tous les siècles à venir, jusqu'à son retour. C'est pour cette œuvre complète, éternelle, achevée, qu'il y avait à payer le prix qui s'appelle la Croix de Golgotha,

Jésus de Nazareth, notre frère dans son humanité, s'est-il assis pour calculer la dépense? Oui. S'asseoir d'abord et calculer la dépense, cela représente pour le Seigneur, les trente années de sa vie d'homme, avant son baptême. S'asseoir d'abord, cela veut dire mener une vraie vie d'homme, toute simple ; connaître le travail et la peine, la veille et le sommeil, la faim et la soif ; connaître les hommes tels qu'ils sont, avec ce qu'il y a en eux de sublime et ce qu'il y a d'infâ­me. Bâtir la tour, c'est aller chercher, au sein de cette humanité, les pierres vivantes, les hommes qui accepteront de monter vers le ciel. Bâtir la tour, c'est encore former ces hommes, vaincre leurs résis­tances, les purifier, les amener à l'obéissance de fils, les mettre chacun à sa place dans l'édifice du Père. Bâtir la tour, c'est tirer l'ordre hors du chaos hu­main, la paix hors de la division, la pureté hors de la souillure.

La dépense à payer ? tout son propre sang, versé, donné sur une Croix de condamnation et de totale solitude.

Après avoir, au cours de ces trente années de vie tout humble, calculé la dépense, le Seigneur Jésus s'avança vers le baptême. Il se livra lui-même au Père comme la première pierre de la tour. Aimons cette phrase de l'écrivain François Mauriac :

«Il prit un manteau, il noua ses sandales. Il dit à sa mère une parole d'adieu qui ne sera jamais connue. »

 

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C'est ainsi que le Seigneur Jésus s'est avancé vers les eaux du Jourdain. Et il y a, dans cette pensée [29] qu'il est lui-même l'homme qui bâtit la tour, la source d'une joie pure pour notre cœur. Jésus a cal­culé la dépense, il a payé le prix : donc il achèvera de bâtir. Depuis le baptême du Seigneur par les mains de Jean-Baptiste, la victoire des plans divins est assurée. Le Malin ne peut pas empêcher la réali­sation de la sagesse éternelle quant à l'Eglise, épouse de Christ. Il ne peut pas y avoir d'amertume, d'ai­greur, de crainte dans le cœur. Quoi qu’il arrive, la tour sera achevée et parfaite. L'homme s'est assis et a calculé la dépense. La Croix se dresse au centre de cette parabole pour nous rassurer et nous affermir en face de tous les assauts de la puissance infernale. Jamais les démons ne pourront se rassembler et railler notre Maître, disant: Cet homme a commencé à bâtir et il n'a pu achever !

 

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Ainsi Jésus est l'homme qui bâtit l'Eglise, et il s'est livré lui-même au Père, par les mains de Jean-Bap­tiste, pour être la première pierre de l'édifice. De même nous, quand nous sommes baptisés au nom de Jésus, nous nous livrons à Jésus, par les mains d'un homme, pour être à notre tour des pierres vi­vantes de son Eglise. Et comme Jésus est à la fois ouvrier dû Père et pierre vivante lui-même, de même nous, nous sommes à la fois pierres vivantes et ou­vriers de Jésus. Voilà pourquoi les disciples, comme le Maître, doivent calculer la dépense avant de s'a­vancer vers les eaux du Jourdain. Chacun des disci­ples devient un homme qui bâtit la tour, subordonné au grand Bâtisseur. La parabole s'applique au disci­ple après s'être appliquée au Maître.

 

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Pour le disciple, comme pour le Maître, s'asseoir d'abord, c'est vivre une vie toute simple d'homme de la terre, avant de se livrer entre les mains de Jésus pour le suivre. Les nouveau-nés que l'on bap- [30] tise n'ont pas eu le temps de s'asseoir d'abord. Répé­tons-le. ici : malgré toute la peine que cela peut causer à notre cœur, nous ne pouvons pas, dans ce Réveil, ne pas baptiser dans l'eau les disciples qui se lèvent pour préparer le retour du Maître, — l'achè­vement de la tour, — même s'ils ont reçu le baptême des nouveau-nés. Rien ne peut remplacer ce que Jésus-Christ a institué par un acte accompli dans sa propre chair. Confirmation du baptême chez les protestants : on connaît l'insuffisance de ce rite. Cartes de décisions, signatures, bancs des pénitents, mains levées, témoignages, toutes méthodes em­ployées par les revivalistes et les églises dissidentes, sont bonnes certes, mais ne peuvent remplacer la voie de Jésus. Ce qui s'en rapprocherait le plus, il faut le dire, c'est la prise de voile de la jeune fille catholique quand elle prononce ses vœux monasti­ques. Là il y a, dans la généralité des cas, un sé­rieux, un dépouillement, qui nous amènent près de la Croix. Mais ce n'est pas encore le baptême, avec l'abandon de tout l'être à Jésus, sans plans humains, sans projets conçus à l'avance.

 

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Nous-mêmes, depuis le début du Réveil, nous n'a­vons pas encore saisi la réalité du baptême que le Seigneur a mis devant nous. Nous sommes loin de l'avoir pratiqué avec le sérieux et la profondeur que veut le Maître. Combien de nos baptisés risquent de devenir des hommes autour desquels les démons s'assemblent et raillent, disant : Cet homme a com­mencé à bâtir, et il n'a pu achever !

Un redressement est absolument nécessaire, un appel doit être adressé à ceux qui ont déjà été bap­tisés. Comme Paul aux Romains, nous devons leur poser la question : Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, c'est en sa mort que nous avons été baptisés? Et à l'avenir, nous de­vons mettre nettement devant les candidats qui se [31] lèvent, la Croix qui se dresse au centre du baptême. La victoire de Christ, c'est sa Croix. La victoire de l'ouvrier de Christ est dans la Croix de Christ. Ce n'est pas la |peine de s'engager dans l'œuvre de Christ, si ce n'est pas pour persévérer jusqu'à la victoire. Ce n'est pas la peine d'être baptisé si l'on ne prend pas sa Croix.

Pour Jésus de Nazareth, la Croix acceptée au mo­ment du baptême, c'était la crucifixion des bri­gands condamnés par les Romains. C'était le rejet total de son être par son propre peuple, les Juifs, pour être mis à mort, dans sa chair, entre deux mal­faiteurs. Pour nous, disciples, la Croix n'est pas l'imi­tation littérale de cette Croix unique. Quelle est-elle donc, cette Croix, qu'il faut savoir contempler avant de devenir une pierre vivante de la tour, en passant par le baptême ?

 

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LA CROIX DU DISCIPLE PEUT SE DEFINIR AINSI : LA SOLITUDE ABSOLUE DE L'ÊTRE PAR RAPPORT A TOUS LES ÊTRES DE LA TERRE, AFIN D'ÊTRE UNI A JESUS-CHRIST AVANT D'ÊTRE REUNI A AUCUNE CREATURE PAR JESUS-CHRIST LUI-MÊME.

Lorsque, adultes, après avoir vécu sur la terre, nous entendons l'appel de Jésus, cet appel nous trouve liés par des liens humains à un grand nom­bre d'êtres de la terre. Par le baptême, Jésus veut couper absolument tous ces liens, sans aucune ex­ception, afin de lier notre être à lui seul. On meurt seul. On est baptisé seul. Emmener avec soi, dans son être, sous l'eau du baptême, d'autres créatures, les garder dans la minute sacrée de l'immersion, c'est ne pas croire en Jésus-Christ, c'est ne pas lui donner tout notre cœur, c'est ne pas être baptisé.

Dans la première jeunesse, ce sacrifice de tout, pour aimer Jésus au centre de tout, est aisé quand le cœur est droit et pur. Aux alentours de vingt ans, [32] un cœur peut être frais encore, et donner au Sau­veur toute sa fleur. Dans la vieillesse, quand la mort a passé près de l'homme, quand il voit approcher l'heure du total dépouillement pour lui-même, alors il peut aussi comprendre ce baptême, et, avec joie, aller seul avec celui qui aime et qui console. Il y a des êtres qui sont si seuls dans la vie que le baptême, en leur faisant trouver Christ plus près qu'aucune créature, leur apporte plus de joie que de renonce­ments nouveaux. Mais, au milieu du chemin, quand on est tout enfoncé dans la vie ; quand on a femme, enfants, intérêts terrestres, amis, estime des hom­mes ; quand l'être est lourd de toute cette vie ter­restre épanouie en lui : il est difficile alors d’être baptisé. Que l'homme de trente, et surtout de qua­rante ou de cinquante ans, calcule bien la dépense avant de se mettre à d'ouvrage de la tour ! C'est par miséricorde que le Seigneur l'avertit ainsi.

 

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On est baptisé seul. On quittera donc tous ses amis du monde, les incroyants, les pécheurs, les croyants tièdes. On quitte les plaisirs du monde, les modes du monde. On reçoit la robe blanche lavée dans le sang de l'agneau. On reçoit une vie nouvelle, de prières et de vertus, produites par la grâce de Christ. Il y a une austérité pour l'Epouse de Christ, dont la cité est dans les cieux, dont l'Epoux est encore absent. Aus­térité dont l'emblème, dans l'Eglise, en vue du re­tour de l'Epoux, est le vêtement des femmes, avec la simplicité, la décence, la pureté que décrit l'Ecriture. La rupture avec les amis, les mœurs du monde, est dure à tous, jeunes et vieux. Elle est la première à considérer : elle n'est pas la seule.

Car il y a un monde religieux. Dans les églises, branches du corps de Christ, encore séparées les unes des autres à l'heure actuelle, le monde est mêlé à l'Evangile, la mort à la vie. Dans le baptême, on meurt à tout ce qui  est mortel  dans  les  églises. [33] Ce qui est élevé parmi les hommes est une abomina­tion devant Dieu. Il faut mourir à toute gloire que l'on tire de sa vie religieuse, à tous les honneurs ter­restres qu'on avait coutume de joindre au service de Christ. Il faut mourir aux réunions à succès, à la popularité de prédicateur, à la popularité d'écri­vain, à la popularité de bon membre d'église. Il faut re­noncer à glorifier la branche dont on fait partie : église catholique, église anglicane, église luthérienne, église réformée, église méthodiste, Armée du Salut, groupe de Frères, Assemblées de Dieu, — j'en passe, — au détriment de la seule réalité qui compte pour le retour du Maître: son Epouse, son Eglise, une et sans tache.

Ce n'est pas tout. On est baptisé seul. Le mari est baptisé sans sa femme, le père sans son enfant, la fille sans sa mère, l'ami sans son ami. Christ veut la première place, avant les êtres que l’on a aimés dans l'affection de la famille ou de l'amitié. Si nous voulons les retrouver pour l'éternité, nous devons les perdre pour un temps. La seule source d'amour et de vie est en Christ. Si nous voulons aimer et don­ner la vie, il faut quitter les affections terrestres et venir à cette source. Si nous repoussons Jésus pour garder les affections terrestres, nous choisissons la mort pour nous-mêmes et pour ceux que nous disons aimer. Si nous quittons ceux que nous aimons pour trouver la vie en Christ, nous choisissons la vie, pour nous-mêmes, et ensuite pour ceux que nous avons laissés. L'acte de quitter les siens, n'est pas forcément une séparation matérielle. Celle-ci peut être nécessaire, mais ne l'est pas toujours. Ce qui est toujours nécessaire, c'est de se donner seul à Christ seul, et par suite d'écarter avec douceur, mais avec une entière fermeté, toute influence de la terre qui voudrait guider une vie qui n'appartient plus qu'à Jésus.

Est-ce à dire que Jésus va nous emmener chacun [34] seul sur une île déserte ? ou nous enfermer dans une cellule de reclus ?

Parler ainsi serait bien mal connaître ce Dieu d'a­mour. Par le baptême qui coupe tous les liens, la pierre brute est sortie de la carrière où elle était confondue avec les autres. Cette pierre est remise en­tre les mains de l'homme qui bâtit la tour. Les mains de cet homme ont été percées pour nous : ce sont des mains d'amour. Aussi ce Maître divin va-t-il placer la pierre de telle sorte que le cœur de sa créature s'épanouisse. Tout a été coupé pour que Jésus puisse tout reprendre, tout remettre en place, non plus selon la confusion des ténèbres, mais selon la lumière de la vie. En lui, soyez tranquille, tous les besoins d'affection de votre être seront contentés, en lui vous allez trouver l'amour vrai, en lui vous allez être lié à nouveau à des êtres. Seulement, ce ne sera pas comme avant, des liens de chair, mêlés d'orgueil, d'égoïsme, d'impureté. Ce seront les liens de l'Esprit, purs, vrais, éternels.

Accepter de se laisser lier par Jésus de ces liens-là, cela fait partie de la Croix du baptême. La Croix, c'est la mort de notre volonté propre, qui voudrait choisir les êtres à aimer, qui voudrait fixer les temps et les saisons pour aller vers celui-ci ou vers celui-là. Non. Baptisé en Christ, ta place est fixée par Christ. Même ta place matérielle : tu ne peux demeurer que là où Christ te mettra, et travailler au milieu des hommes que sous la direction du Maître céleste. Disciple de Christ, tu es une pierre dans sa tour. Tu as une place unique, touchant telle et telle pierre, choisie par lui, portant le poids de telle et telle, por­tée toi-même par telle et telle. Il y a des pierres que tu voudrais tout près de toi, et qui sont loin par la sagesse du Père. Il y a des êtres près de qui tu dois vivre, et qui sont plus loin de toi cependant, que tes frères et sœurs dans ton église locale. Si tu redoutes ces choses, avant d'être baptisé, calcule la dépense, médite la Croix. Et si tu as été baptisé sans com- [35] prendre ces choses, tu peux encore te retirer. Il en est temps encore, car Christ ne veut pas te prendre en traître. Il attend et ne veut de toi qu'un don libre et total de tout ton être.

Dans la construction de Christ, il y a des bergers et des brebis, des conducteurs et des troupeaux. Par rapport à ces plans que Dieu a révélés dans le Nouveau Testament, chacun a une destinée fixée par Dieu seul. La Croix du baptême accepte cette desti­née. Es-tu destiné à être berger, alors tu auras des brebis, qui ne seront pas choisies par toi, qui ne sont pas une famille selon la chair, et pour lesquelles tu devras souffrir dans l'amour du seul Bon Berger. Es-tu destiné à être brebis, alors tu auras un berger vers qui Christ te conduira, tu auras, à la même table de communion, des frères et des sœurs qu'il te faudra supporter tels qu'ils sont : ni le troupeau qui est le tien, ni ton berger, ni les autres brebis, ce n'est toi qui les choisiras. Cela aussi, c'est la Croix du bap­tême.

I1 y a aussi dans la construction de la tour, des hommes et des femmes. La Croix de l'homme, c'est de prendre, dans l'amour, sa place de chef, et d'aller à Christ, sans interposer aucune femme entre lui et son Maître. L'homme a dans son cœur déchu, un be­soin profond de s'appuyer sur la femme, de se lais­ser diriger par elle, dominer par elle, consoler par elle. En Christ, il n'en est pas ainsi. Le Sauveur doit être tout pour le cœur de l'homme ; et l'homme doit se dévouer pour la femme, pour la diriger, l'instruire, la soutenir, sans s'appuyer sur elle. L'homme doit s'appuyer sur Christ seul afin de se donner, par l'Es­prit, pour la femme qui lui est confiée par Christ, en la personne de la pécheresse à sauver, de la malade à guérir, de l'épouse pour qui on se livre, de la fille dont on est père spirituel, de la sœur dont on est le frère, de la brebis dont on est berger, de la servante dont on est le maître.

La Croix, pour la femme, c'est de ne pas exercer [36] sur l'homme de domination d'esprit, afin de le laisser libre de s'épanouir en Christ, et de revenir à elle, lui donnant le pain de vie. Il y a au fond de toute femme, hors de Christ, quelque chose de faussé par rapport à l'homme. Et dans les églises même, on est loin d'avoir sondé toute la beauté de l'enseignement biblique que Dieu veut nous rendre par le Réveil, avant le retour de Christ. Une femme ne peut pas être dans la vérité parfaite de Christ si elle n'est pas liée à une communion en Christ, dans laquelle elle ait l'appui de l'homme. Et rien n'est plus naturel pour la femme que de croire, en se fiant à son intui­tion, qu'elle est dans la vérité parfaite, sans réaliser cette condition.

 

ÜÜÜ

 

Toute cette parole est dure, direz-vous ? Inhumai­ne? Sans amour ? C'est la parole de Christ, la révéla­tion de Dieu. Elle est tellement contraire à l'intelli­gence naturelle que peu d'êtres veulent l'accepter. C'est lorsque de grandes foules faisaient route avec Jésus que le Maître se retourna vers elles pour leur dire la parabole de l'homme qui bâtit la tour. Il est bien à deviner que, après avoir entendu ces paroles, les foules fondirent comme neige au soleil, comme nous le voyons expressément dit dans le chapitre six selon Saint Jean.

Le moment est venu pour les conducteurs du Ré­veil actuel, qui est le dernier sur la terre, qui pré­pare le retour du Maître en préparant la personne de son Epouse, de se retourner vers les foules qui se­raient tentés de les suivre par enthousiasme humain et de leur redire avec amour la parole de l'homme qui bâtit sa tour.

[Nous sommes tout au début d'un nouveau Réveil, d'un dernier Réveil. Ce qui importe en ce début, ce n'est pas un grand nombre visible, c'est une fonda­tion solide.

Nous n'avons pas à baptiser en vue du salut indi- [37] viduel. Au cours des siècles, et aujourd'hui même, des âmes nombreuses sont sauvées et ne passent pas par le baptême. Plus profondément encore, le salut est dans la croix de Christ, et uniquement là. Dieu donne ce salut comme il veut ; et quand l'homme reçoit le salut et s'en nourrit, c'est encore Dieu qui le fait en lui.

Sous la poussée de l'Esprit, et sous la pression des faits, le corps de Christ va aller se constituant for­tement, par des voies toutes spirituelles, dans les années qui viennent, — nous pourrions dire : dans les années qui restent. Plus ce corps sera fort inté­rieurement de la force de l'amour divin, plus il sera enrichi de grâces spirituelles, plus nombreuses se­ront les âmes qui viendront à Christ pour être sau­vées.

Le baptême du Réveil n'est donc pas destiné à atteindre un grand nombre d'âmes, en vue d'un mou­vement visible nouveau. Le baptême du Réveil a pour but la constitution spirituelle du corps de Christ, en vue du retour du Maître. Le monde sera sauvé, sans reli­gion et sans rite, par la croix de Christ. Mais Christ est servi par ceux qui le suivent pour que le monde soit sauvé. Pour le moment,] la troupe qui se donne à Christ, tout près de sa Croix, pour que le monde soit sauvé, est une petite troupe, méprisable et mé­prisée.

Croyez-vous vraiment que vous deviez entrer dans cette troupe ?

Avez-vous déjà calculé la dépense ?



[1]  Brochure imprimée en Belgique (sans date). Le texte de cette brochure est la reprise de 3 articles parus dans « Esprit & Vie » : « Qu’est-ce qui empêche que tu ne sois baptisé ? », février 1937 (n°2), pp. 13-16 ; « Baptisés en un seul esprit pour former un seul corps », mars 1937 (n°3), pp. 25-29 ; « S’asseoir d’abord et calculer la dépense », mai 1937 (n° 5), pp. 51-54.

[2]  Les nombres entre crochets renvoient à la pagination de la brochure originale. Toutes les notes de bas de page ont été ajoutées par nous afin de faciliter la lecture du texte.

3  Le texte entre crochet ne figure pas dans l’article de « Esprit & Vie » de mars 1937.

 


Date de création : 15/09/2016 @ 12:58
Dernière modification : 15/09/2016 @ 12:58
Catégorie : Ecrits de Louis Dallière
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